#LEPOINTJ #5: L’ÉCOSEXUALITÉ AVEC LES ARTISTES ELIZABETH STEPHENS ET ANNIE SPRINKLE
Extrait de l’émission SUICIDE FM #14
Bonjour à vous qui revenez sans doute d’un week-end en dehors de Paris, vous qui avez participé aux embouteillages sans fin dimanche soir dernier, mais aussi vous grâce à qui plus jamais je ne repartirai en voiture lorsqu’il y a un jour férié qui s’incruste.
Car oui je suis partie dans le Finistère Sud, et je me suis surprise à caresser l’écorce d’un arbre, le velours d’une mousse attrayante verdoyante ou encore glisser l’empreinte de mes doigts sur un schiste feuilleté.
Je n’avais pris aucune drogue hallucinogène est pourtant ces feuilles vertes entre deux rayons de pluie avaient quelque chose de doux, de sensuel.
Serai-je écosexuelle ? Le point J est en suspens, il s’interroge.
Avec l’écoséxualité, il ne s’agit plus d’envisager la Terre mère, mère nature telle qu’elle est donnée par la société patriarcale où la « Culture » est réservée à l’homme, mais plutôt de considérer celle-ci comme votre amoureul (un.e amoureux.se), notre amanl (un.e amant.e). Ce mouvement se répand notamment grâce au travail de deux artistes féministes, qui en 2008 ont écrit l’ecosex manifesto. Elles sont amoureuses et s’appellent Elizabeth Stephens et Annie Sprinkle et ce n’est pas sans humour, qu’elles défendent l’écologie sexuelle afin de rendre la sexualité plus, je cite : « sexy, drôle et diverse ».
Elles réalisent des performances dites éducatives, parmi elles 25 façons de faire l’amour à la Terre, symposium écosexuel entre danses, dialogues, chants et caresses avec les éléments naturels environnant. Elles se sont également mariées 14 fois à différents endroits des États-Unis avec des éléments comme la poussière, les pierres, l’eau.
Les deux artistes cherchent à créer un maillage entre l’humain.e et le non-humain.e. Elles défendent à la fois : l’importance du désir et du plaisir, sensations instables, dans la constitution d’une sexualité étendue, mouvante, libre et défaite de toutes frustrations, et d’une identité mouvante, élastique, non-binaire ni hétéronormée. Elles souhaitent par ailleurs établir une justice environnementale, défendre le Terre contre les agressions et exploitations engendrées par le capitalisme.
Déconstruisons la relation dominé/dominant, bouleversons l’anthropocentrisme, envisageons de prendre soin de notre corps car il est la Terre, et que la Terre est notre corps, et que nous sommes alors finalement aussi un peu non-humain.es. Comme ces 100 000 personnes à travers le monde qui pratiquent une sexualité positive,faisons des expériences érotiques, entouré.es d’un éros à tics, multiples, lobe d’oreille titillé, doigt de pied sucé, téton effloré, défloré, un bourgeon au doigté assoupli, souplesse d’une caresse sur une tige enneigée, frissons sur des cotes éventées.
Nous sommes invité.es à retirer nos œillères afin d’appréhender des horizons infiniment plus étendus, ET si ça vous plait de vous déshabiller des préconçus et de vous habillez de chouettes idées je vous conseille les ouvrages de Donna Haraway ou de Starhawk parmi d’autres !
Mais avant cela reprenons ensemble le 6 ème point du manifeste ecosexe:promettons à la terre de l’aimer, de l’honorer et de la chérir jusqu’à ce que la mort nous rassemble, et pour cela laissons nos désirs se répandre :une plante succulente au creux de nos jambes, des orties brulantes en battement sur nos fesses, une langue qui se frotte à une pierre scintillante, des dos nus fouettés tendrement par une cascade vivifiante ou encore de la terre humide déposée dans nos lits, pour faire comme Beth et Annie dans leur performance Dirt Bed.
Mais attention soyons vigilent.es, la nature a elle aussi son mot à dire, un rapport érotico-sexuel doit toujours être consenti ! Puisse-t-elle nous autoriser à la défendre et à nous défendre contre sa déconstruction, celle de ses monts et merveilles, afin de pouvoir dérouler un tout va bien se passer sur Suicide fm !