Une radio bien bandante.
Article paru dans Technikart N°29 signé Laurent Clay
REVUE MAGAZINE MUSIQUE TECHNIKART N° 29 1999 MARC OLIVIER FOGIEL TENTATION GAY *
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Radio FG, homo, techno et parisienne, incarne un esprit sans chichis qui attire les auditeurs de tous bords.
«Quand je suis arrivé à Radio FG, j’ai dû négocier mon contrat. On était en été. Mon patron m’a filé rendez-vous à “tata-beach”, ce quai de Seine où les gays draguent et se font bronzer. On a discuté pendant une heure en maillot de bain, entouré d’homos. » Xavier, 22 ans, est, hétéro. Un malheur qui ne l’empêche pas de travailler à Radio FG, d’évoluer au milieu des efféminés et des ultravirils et de s’en porter à merveille. En compagnie de deux autres castors juniors, Olivier Schmitt (animateur en chef) et Xavier (déconneur en second), il concocte l’émission du matin, Get Up (de 7h00 à 9h00), réveille-matin speedé et tête-à-claques. Le ton est parfois approximatif, évidemment branchouille, mais toujours revigorant. Ces trois mignons forment le trio hétéro de FG, mascotte de la station et étendard de l’esprit open qui souffle in the bouse. Cet esprit a conduit FG à changer le sens de ses célèbres initiales. De Fréquence Gaie (de 1979 à 1988), elle est devenue Future Génération, délaissant progressivement son identité homo (han-han) pour se convertir à la techno (boum-boum). Un changement qui a été vécu comme une trahison par certains. Libération titrait l’année dernière : « FG perd les pédales. » Mais Henri Maurel, président de FG, et grand responsable de cette évolution, n’en a cure : « Je comprends très bien que certains pédés ne veuillent pas écouter FG. Je n’ai jamais prétendu faire la radio officielle de la communauté. Je ne me considère pas comme un gardien du temple. C’est ma nature : je ne fréquente pas les temples. »
Certains ne voient dans cette «nature» qu’opportunisme. N’empêche : Maurel a développé un laboratoire étonnant, une basse-cour où homos et hétéros gloussent de plaisir d’être ensemble. Au sujet des hétéros fascinés par FG, Maurel a inventé le terme de « para-folle » ou d’« hétéro flexible ». « On s’est rendu compte que la radio attirait un type d’auditeurs et Thomas Plessis, Olivier Schmitt et Xavier Faltot, animateurs de .Get Up, ils incarnent les «hétéros-flexibles» de FG. d’interlocuteurs, journalistes et autres, qui étaient des hétéros basiques et qui circulaient, parfaitement à l’aise, dans la confusion des signes du système gay. Ils viennent vivre une liberté beaucoup plus grande, qui est celle du mode de vie homo. Ils y trouvent leur plaisir, s’épanouissent. » Henri Maurel, grand tentateur, les a-t-il attirés ? Fait-il du prosélytisme gay ? « C’est eux qui sont venus parce qu’ils se sentaient accueillis. Grâce à la radio. Elle a quelque chose de contemporain : elle n’impose pas un système sémantique fermé et contraignant. La radio invente un mode de vie et des relations sociales et culturelles différentes qui sont liées à notre ville, Paris. » Mais comment expliquer un tel esprit d’ouverture ? D’après lui, Radio FG est la métaphore parfaite du passage du gay au queer : « Ce média est parti, en 1979, d’une posture identitaire, revendicatrice, qui correspondait à l’époque à un besoin d’air, à un cri primai. L’équipe que j’ai amenée en 1992 est marquée par un parcours militant. Mais elle l’a dépassé parce que c’est la génération des années 80. Elle a vécu de tous temps dans la légalisation de l’homosexualité. Elle a mesuré l’impasse de l’identitaire forcenée, à l’américaine. Ce sont des rescapés qui n’ont pas envie de se prendre la tête. Je ne suis pas obsédé par le terme “queer”. Mais si cela permet de poser cette problématique de l’identité, du genre, des signes, des normes, de tout ce qui permet de construire une relation entre les gens, c’est bienvenu. » Et de conclure : « Les pédés, les lesbiennes, les hétéros de la station sont en train de trouver un nouvel espace de communication. C’est très bien. L’essentiel, c’est que les gens soient heureux ensemble. »