ArticlesPour un nouveau système Économique

Ce que cette pandémie va changer : l'analyse des intellectuels

Faut-il repenser notre système économique ? Le leadership mondial est-il aux abonnés absents ? Cette épidémie fait-elle le lit de systèmes autoritaires ? Trois intellectuels, Mariana Mazzucato, Yuval Noah Harari et Pankaj Mishra, répondent.

“Il faut promouvoir un capitalisme différent”

Mariana Mazzucato, économiste américaine

“Il faut pour cela repenser le rôle des gouvernements : plutôt que de se contenter de corriger les défaillances du marché lorsqu’elles ont lieu, ils devraient chercher activement à mettre en place et créer des marchés qui assurent une croissance durable pour tous […]. Il est grand temps de tirer les douloureuses leçons de la crise financière mondiale de 2008. Il ne faut pas se contenter de distribuer de l’argent aux entreprises. Mais plutôt poser des conditions pour s’assurer que les plans de sauvetage financiers puissent transformer les secteurs auxquels ils viennent en aide et leur permettre de jouer un rôle dans une nouvelle économie : une économie axée sur la stratégie du New Deal écologique, qui consiste à réduire les émissions de carbone tout en investissant dans la formation des travailleurs, et s’assurer que ces derniers peuvent s’adapter aux nouvelles technologies. Cela doit être fait maintenant, pendant que le gouvernement a la main.”

Dans The Guardian, le 19 mars.

“Le chacun pour soi est un danger”

Yuval Noah Harari, historien israélien

“Il manque à l’humanité un leadership mondial. […] L’administration US actuelle a coupé le soutien aux organisations internationales telles que l’Organisation mondiale de la santé et a clairement fait comprendre au monde que les États-Unis n’avaient plus de vrais amis – ils n’avaient que des intérêts. La confiance dans l’administration américaine est érodée. Qui a envie de suivre un leader dont la devise est “Moi d’abord” ? […] Le vide laissé par les États-Unis n’a été comblé par personne d’autre. La xénophobie, l’isolationnisme et la méfiance caractérisent désormais le système international. Sans confiance et sans solidarité mondiale, nous ne pourrons pas arrêter cette épidémie. Espérons que cette crise aidera l’humanité à se rendre compte du danger aigu que représente la désunion mondiale.

[Cette épidémie] pourrait être une occasion en or pour l’UE de regagner le soutien populaire qu’elle a perdu ces dernières années. Si les membres les plus chanceux de l’UE s’impliquaient rapidement afin d’aider leurs collègues les plus durement touchés, cela prouverait la valeur de l’idéal européen mieux que n’importe quel discours. Mais si chaque pays doit se débrouiller seul, alors l’épidémie pourrait sonner le glas de l’Union.

Dans Time, le 15 mars.

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“Le Léviathan est de retour”

Pankaj Mishra, essayiste, romancier et journaliste indien.

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“Nous vivons une période extraordinaire. […] Le coronavirus indique une transformation radicale, du type qui ne se produit qu’une fois par siècle et qui fait éclater toutes les idées communes d’avant. Toutes les conditions qui ont mené à la Première Guerre mondiale, puis à la crise économique de 1929 sont à nouveau réunies. Depuis des décennies, la désindustrialisation, la délocalisation des emplois, puis l’automatisation ont privé de nombreux travailleurs de leur sentiment de sécurité et de leur dignité, ce qui, dans les pays occidentaux, les a rendus vulnérables aux démagogues. Dans le même temps, le ralentissement de la modernisation économique ou le processus bâclé d’urbanisation lancé par les puissances ‘en rattrapage’ comme l’Inde ou la Russie ont créé, de façon prévisible, la base politique pour des figures et des mouvements d’extrême droite.

[Cette crise remet l’État au centre. Mais il serait judicieux de se souvenir que,] entre la Première et la Seconde Guerre mondiale, l’État a tellement pris le contrôle de ses citoyens que certains pays sont carrément devenus fascistes. L’histoire des guerres et des génocides dans la première moitié du XXe siècle nous apprend que l’accumulation de ‘bio-pouvoir’ – la technologie de contrôle et de manipulation d’un grand nombre d’humains – peut permettre des crimes épouvantables. De toute évidence, les techniques de surveillance à la disposition de l’État contemporain, comme cela est manifeste en Chine, ne peuvent que limiter encore davantage les droits humains et les libertés. Le Léviathan est de retour.”

Dans Bloomberg, les 16 et 17 mars.

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Le socialisme qui repose sur la propriété collective des moyens de production et une centralisation des décisions économiques. Le capitalisme qui repose sur la propriété individuelle des moyens de production et qui est mû par la recherche du profit.
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Source
Courrier International
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